Fiançailles malgaches

Les fiançailles ici revêtent une importance toute particulière. Bien sûr la vie moderne a sans doute un peu émoussé une partie des coutumes, en substituant l’argent aux dons en nature par exemple, mais l’essentiel reste vivace.

Il faut savoir que dans les familles malgaches traditionnelles, il est pratiquement impossible pour un garçon et une fille de « sortir ensemble », et a fortiori d’habiter ensemble, sans être passés par toutes les étapes qui suivent.

Fisehoana (« pré-fiançailles »)

Il s’agit de la première officialisation de l’union, qui avait autrefois une importance plus grande mais qui aujourd’hui se réduit plus à une formalité. Ceci correspond plus ou moins à la demande de la main de la fille qui se pratique en Europe. Sauf qu'ici tout se fait en famille…

La famille proche de la fille (parents, grands-parents,  frères et sœurs) reçoit la famille proche du garçon, le père présente toute la famille, et le garçon présente sa famille à lui.

Discussion entre les deux familles  sur la lignée du garçon, ses projets, ses intentions (compte-t-il bien aller jusqu’à l’autel ?), sa capacité à subvenir aux besoins du ménage, etc…

Discussion similaire au sujet de la fille

Si tout se présente bien (pas de risque de mésalliance, le garçon paraît sincère et crédible, …),  on passe à l’organisation des fiançailles proprement dites, avec  répartition des frais entre les familles. Autrefois les fiançailles étaient à charge de la famille de la fille, et le grand mariage de celle du garçon. Aujourd’hui c’est plutôt l’ensemble des frais qui est partagé entre les deux parties.

Vody ondry (fiançailles)

C’est toujours la famille de la fille qui reçoit. Cette fois c’est le grand cercle familial, et les aînés sont privilégiés. Bien sûr, lorsque les invités sont trop nombreux pour être reçus dans la maison familiale, ou pour d’autres raisons « techniques » (parents divorcés par exemple), ça se passe à l’extérieur, dans un endroit neutre. Mais la famille de la fille élit en quelque sorte domicile provisoire dans le lieu choisi

La famille de la fille est à l’intérieur, la famille du garçon attend dehors la permission d’entrer. C’est le père de la fille qui accueille et qui la donne, en général.

Entre d’abord le père de la fille, puis le garçon (avec un bouquet dans lequel est cachée la bague de fiançailles) et sa mère à lui, puis le père et la fratrie, enfin le reste de la famille. Les gens à l’intérieur se lèvent.

      

Prière puis discours (kabary) par le père de la fille, un autre aîné, ou un orateur professionnel spécialisé (mpikabary). On remet la journée et le succès de ces fiançailles au Tout-Puissant.

L’orateur côté garçon remercie et fait alatsiny (lever tous les tabous, pardon de prendre la parole)

          

Alafady : destiné au frère aîné – on lui offre un tapi-maso (littéralement « bander les yeux ») en lui offrant quelque chose (auparavant de la volaille ou du bétail, maintenant plutôt de l’argent).  Mais le frère en question peut discuter et faire monter les enchères, pour de rire ou pour de vrai, bien qu’en général aujourd'hui tous les détails ont été réglés à l’avance.

Le mpikabary  côté fille remercie et prend mille précautions oratoires avant de mettre en lumière toutes les qualités de la fille, et d’expliquer que tout le monde est là pour connaître les vraies intentions du futur fiancé.

Le mpikabary  côté garçon remercie aussi, se déclare honoré au nom de tous, puis décrit les intentions du garçon et vante ses qualités, notamment son physique...

Les mpikabary sont là pour, entre autres, "marchander" la fille. Il est arrivé des cas où les parents de la fille n'étaient pas d'accord sur la somme (ou autrefois les dons comme le bétail ou autres) et tout se rompait là pendant cet échange. Mais en principe ça n'arrive plus… Et bien sûr pendant ces échanges chaque partie essaie de montrer que leur enfant est le partenaire rêvé pour l'autre.

    

Les kabary peuvent être longs, et certains doivent lutter contre la somnolence...

Le garçon donne aux parents le vodi ondry (« le cul du mouton ») pour compenser la perte de leur fille – jadis du bétail, maintenant de l’argent : souvent toutes les coupures et pièces qui existent, en quantité variable

Le mpikabary  côté fille remercie, et annonce que si elle y consent, la fille peut partir

S’ensuit souvent une petite mise en scène, où de fausses promises (sœurs, cousines de la fiancée) sont amenées. Le futur n’a pas intérêt à tomber dans le piège et à se lever pour les accueillir…

 Fausses promises...  

Soit dit en passant, si par exemple une soeur cadette se fiance avant l'aînée elle est dans l'obligation de lui offrir un "saronak'arona" (généralement de l'or) comme signe de respect pour demander pardon d'être passée avant elle.

Enfin la "vraie", très émue

Enfin, la vraie fiancée entre, au bras de son père. On lui explique tout ce qui s’est passé, et on lui demande si elle accepte.                         

Si tel est le cas, le garçon lui offre le bouquet. La fille y cherche la bague (qui est parfois difficile à trouver, selon le tempérament facétieux du garçon…).

  

         

 Quand elle est trouvée, tout le monde applaudit, et le garçon lui passe la bague au doigt et lui donne le baiser.  TRES IMPORTANT, LE BAISER !!!

       

Les petits tricheurs ne voulaient pas s'embrasser pour de vrai devant tout le monde, mais devant l'exigence générale ils ont dû céder...

Les orateurs des deux parties se disent satisfaits,  terminent comme ils ont commencé par une prière,  puis invitent tout le monde à festoyer… A la fin des agapes, les fiancés coupent ensemble le gâteau tout en faisant un petit discours (ce qui n’est pas forcément très pratique…).

Après les fiançailles, les tourtereaux sont plus libres de se voir à leur guise. Sans toutefois pouvoir vivre ensemble. Pour ça il faudra attendre le mariage, civil et religieux…

Je voudrais remercier Hanitra et Satry pour leurs précieux conseils et la correction des bêtises que j'aurais pu dire sans leur aide, et aussi Hervé et Hanitra pour m'avoir permis d'utiliser leur magnifique collection de photos !

Comments

[redlittlesuitcas]

hello,

ravie de voir que tout va pour le mieux,

concernant cet article, je voudrais savoir combien de temps, doivent durer les fiancailles malgaches?

merci et bises

FLIN

[H.Nyaina]

Et me revoilà :) comme promis!!

ça fait un peu bizarre de se voir comme ça dans un blog, n'empêche que je trouve cet article tout simplement magnifique et complet et surtout instructif!!

Princesse d'un jour...une histoire à suivre...^^

Hanitra